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[Cinéma] Les Nuits de Mashhad

Iran 2001, une journaliste de Téhéran plonge dans les faubourgs les plus mal famés de la ville sainte de Mashhad pour enquêter sur une série de féminicides. Elle va s’apercevoir rapidement que les autorités locales ne sont pas pressées de voir l’affaire résolue. Ces crimes seraient l’œuvre d’un seul homme, qui prétend purifier la ville de ses péchés, en s’attaquant la nuit aux prostituées.

Un serial killer au pays des ayatollahs est forcément convaincu qu’il obéit à une mission divine en nettoyant sa ville, ville sainte qui plus est, des prostituées qui la souillent. Le statut de la femme en Iran est connu. Toutes sont contraintes de porter au moins le foulard et sont considérées comme des êtres mineurs puisque, par exemple, c’est le mari et lui seul qui peut demander le renouvellement du passeport de sa femme.
Trois types de femmes sont représentés ici : la journaliste, moderne et instruite qui vient de la capitale, l’épouse soumise et traditionaliste, les prostituées considérées comme corrompues, c’est à dire impures et devant être exterminées. De toute façon, toutes sont pour les hommes des êtres inférieurs que l’on peut harceler et violenter en toute impunité.
Très rapidement nous savons qui est « le nettoyeur », maçon, bon père de famille le jour, il traque les prostituées la nuit, les étrangle en invoquant l’Imam Reza et informe la presse de l’endroit où se trouve le cadavre. Les policiers ne sont pas très motivés pour rechercher le tueur. L’enquête sera donc menée et réussie par la journaliste, aidée par son confrère du journal local.
Une deuxième partie s’ouvre alors qui maintient le suspens sur ce qu’il adviendra à l’accusé car les meurtres  de ces 16 femmes sont considérés par beaucoup comme une œuvre de salut public. L’assassin, vétéran de la guerre Iran-Irak, bénéficie du soutien d’anciens combattants. Le souvenir de cette guerre est très prégnant en Iran. Les soldats qui y ont été tués sont appelés « martyrs », ils sont célébrés publiquement par des affichages de leurs photos sur les murs des villes ou sur des panneaux aux carrefours. Leurs familles bénéficient de privilèges importants. L’assassin, dans sa quête fanatique, regrette d’ailleurs de ne pas être mort en martyr.

Zar Amir Ebrahimi qui incarne la journaliste a reçu le prix d’interprétation féminine au dernier festival de Cannes. Mehdi Bajestani est impressionnant dans le rôle du serial killer. Les autres acteurs, moins connus, sont tous excellents, y compris l’adolescent, fils du tueur.

Ali Abbasi, cinéaste danois d’origine iranienne, a tourné ce film sombre en Jordanie à cause de la censure du gouvernement iranien qui a, par la suite, condamné le film et le prix décerné à l’actrice principale. Au-delà du fait divers et du polar, c’est une dénonciation de plus contre la société iranienne.

15 Comment

  1. Bonsoir les Matching,

    L’affiche interpelle. Elle est vraiment bien construite. Je ne sais pas si j’apprécierais le film..Sans vouloir faire de mauvais jeu de mots, il a l’air poignant..
    il est aussi bien vu de spécifier dans quelles conditions le film a été tourné..auteur danois d’origine iranienne..tournage en Jordanie..Le contexte est finalement tout aussi important que le film en lui même..
    Bonne soirée les Matching!

    1. On ne peut en effet pas séparer ce film de son contexte (ses contextes…), ce qui en fait un polar pas comme les autres…

  2. Bonjour les Matching,
    J’étais à deux doigts de vous envoyer un mail pour savoir si tout allait bien, car cela faisait bien longtemps que vous n’aviez rien publié ! Je suis donc ravie d’avoir votre retour sur ce film.
    L’affiche est magnifique. Le synopsis en revanche me laisse une impression de déjà vu… mais ne serait-ce pas parce que le contexte et la condition de ces femmes restent les mêmes, années après années !?
    Portez-vous bien.

    1. Merci de vous préoccuper de nous. En ces temps de canicule, rien ne vaut la fréquentation des salles de cinéma qui restent, hélas, bien vides.
      Le thème du serial killer est bien sûr très exploité au cinéma. Dans ce film c’est tout le contexte de la société iranienne avec le poids de la religion et les lois de la république islamique qui le distingue des autres. Le réalisateur s’est inspiré d’un fait divers des années 2000 mais rien n’a changé. Bien au contraire si l’on considère la condition de la femme ou la liberté d’expression. Le cinéaste Jafar Panahi, plusieurs fois primé dans des festivals où il n’a jamais pu aller recevoir son prix, vient d’être condamné à 6 ans de prison ferme.

  3. C’est terrible et ce film est porté par une équipe bien courageuse de dénoncer ces événements. Je suis bien triste de lire que le cinéaste vient d’être condamné à 6 ans de prison. On ne réalise pas assez la chance qu’on a de vivre dans un pays où l’on peut s’exprimer librement et où l’on est respecté en tant que femme, même si c’est loin d’être parfait. Bonne soirée à vous deux en espérant que vous ne souffrez pas trop de cette nouvelle vague de chaleur en Europe.

  4. C’est terrible et ce film est porté par une équipe bien courageuse de dénoncer ces événements. Je suis bien triste de lire que le cinéaste vient d’être condamné à 6 ans de prison. On ne réalise pas assez la chance qu’on a de vivre dans un pays où l’on peut s’exprimer librement et où l’on est respecté en tant que femme, même si c’est loin d’être parfait. Bonne soirée à vous deux en espérant que vous ne souffrez pas trop de cette nouvelle vague de chaleur en Europe.

    1. Le cinéaste emprisonné est Jafar Panahi un autre cinéaste iranien plus célèbre qu’Ali Abassi qui a fait Les nuits de Mashhad. Ali Abassi a fui l’Iran, il est maintenant danois. Le ministre de la culture iranien a menacé de punir les iraniens impliqués dans ce film.

  5. Bonjour Matching points, quel film choc. Les scènes de meurtres sont assez insoutenables. J’ai trouvé les acteurs remarquables. Un film à voir. Bonne soirée.

    1. En effet, le réalisateur s’attarde peut-être un peu trop sur ces scènes là. Les acteurs connus ou inconnus de nous sont tous formidables.

  6. Une déception pour moi alors que l’été dernier m’avait clouée avec La loi de Téhéran.
    C’est toujours consternant de voir le sort réservé aux femmes (elles ne sont pas tendres entre elles) et l’hypocrisie des hommes. Ici c’est vraiment violent et le réalisateur insiste bien sur cette violence. Même dans la scène où la 1ère prostituée est emmenée chez un homme qui la violente sans la tuer. Ensuite il peut rentrer chez lui et traiter sa femme avec douceur.
    Je n’ai pas compris le prix d’interprétation. Elle ne joue pas très bien cette actrice et qu’elle se sorte des pattes du tueur et les autres non est invraisemblable même si je suis contente qu’elle s’en sorte bien sûr.
    J’ai apprécié le procès, l’arrogance de l’accusé.
    Le personnage de sa femme est le plus intéressant.

    1. Le prix d’interprétation est peut-être une façon détournée (et très moyennement courageuse) de récompenser le réalisateur et sa critique de la société iranienne. De plus, l’actrice s’est réfugiée en France. Il y a donc pas mal de sous-entendus. Le personnage de la femme du tueur est en effet intéressant et l’actrice qui l’incarne est très crédible.
      Nous n’avons hélas pas vu La loi de Téhéran lors de sa sortie. Nous attendons que le film soit programmé sur une chaîne télé.

      1. Oui je pense que le jury a confondu le rôle et le courageux personnage réel.
        J’imagine mal La loi de Téhéran à la télé. Il vaudrait mieux chercher le dvd. Vous qui avez visité le pays apprécieriez fort ce film puissant.

    1. Nous n’avons pas accès à Apple TV qui diffuse la série israélienne Tehran.
      Bon été à vous aussi

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