Passer quelques jours dans sa ville natale et assister à une soirée lecture d’un des plus grands écrivains allemands contemporains, ça s’appelle un bon timing ! Non, ce n’était que pur hasard, mais quel bonheur !
Je me suis retrouvée dans un grand cinéma-théâtre d’avant (le cinéma avec des fauteuils en velours rouges où j’ai vu mes premiers films…) dans cette petite ville de province, mais ville universitaire tout de même, pour écouter Martin Walser lire des extrait de son dernier livre « Muttersohn« .
Il est né en 1927 et son premier roman « Ehen in Philippsburg « (Quadrille à Philippsburg) paraît en 1957. Considéré comme l’un des grands auteurs de l’Allemagne contemporaine, il a fait partie du Groupe 47 (avec entre autres Heinrich Böll ou Günter Grass) qui rassemblait la nouvelle génération des écrivains allemands. Ses livres sont traversés par un regard critique sur la société allemande de l’après-guerre, soumise à la rentabilité et la performance au détriment des rapports humains. Il s’intéresse à l’anti-héros et à ses conflits intérieurs ainsi qu’ aux microcosmes petits-bourgeois.
En 1998, il a reçu le prix de la Paix décerné par les libraires allemands. Dans son fameux discours prononcé à l’église Saint-Paul de Frankfort et qui provoqua une polémique, Walser affirma que le temps était venu de « tourner la page d’Auschwitz ». Il ne fallait pas oublier mais, selon lui, la répétition des représentations finissait par faire entrer Auschwitz dans la banalité de la commémoration. Il rejette l’« instrumentalisation de l’holocauste » et pose la question : comment faire des camps des musées qui soient à la hauteur des exigences de la mémoire ? Il préfère le développement d’une conscience individuelle à la mise en scène d’une culpabilité collective.
Ce soir-là dans ma petite ville, ce thème ne fut pas abordé, l’ambiance était plus légère. Après la lecture, il accepta un petit entretien qu’il pimenta de sa verve, sa vivacité, ses piques contre Ratzinger, son humour et son charme souligné par son accent du Sud… Ce fut un moment de plaisir et il est vrai, qu’en France, ce ne sont que les spécialistes et germanistes qui connaissent cet écrivain. Dommage !
Merci de me faire découvrir cet écrivain.
Auriez-vous un ouvrage à nous conseiller en particulier ?
@Anne: je ne connais pas son dernier livre, d’ailleurs je ne pense pas qu’il soit déjà traduit en français. J’avais bien aimé « Un cheval qui fuit », « Wolf et Doris »et d’autres plus récents, mais tous ses livres je les ai lus en allemand, par conséquences je ne connais pas leurs traductions.
C’est vrai que je n’ai jamais entendu parler de cet écrivain. Ceci dit, assister à une lecture, par l’auteur himself doit être un moment très privilégié.
Martin Walser a une prestance et une belle voix grave. Je l’entendrai lors de mes prochaines lectures de ses oeuvres.
Oui, les « abus de la mémoire » sont un sujet délicat et Walser a raison de souligner comment les commémorations peuvent souvent au contraire banaliser et non aider à « se souvenir » collectivement….Comme dit justement d’autres auteurs, comme Ricoeur ou Todorov, « le trop plein de mémoire s’apparente à une forme d’oubli ». Ça devait être en effet une belle soirée…
Commémorations et mémoire, un devoir pour l’Allemagne.
« Commémorations et mémoire, un devoir pour l’Allemagne »… et les autres ont le droit et le devoir d’oublier ?
Und der scheiß Kerl Stalin ? ist nie die Rede von dieser « Assassine »
La mémoire dans un sens large du terme concerne tous les pays, bien sur !